J'ai compris l'abbé Pierre
Thamrat a vécu dans un logement de 28 m2 indécent avec sa petite fille pendant 7 ans. Du plomb dans les murs, pas de carreau à la fenêtre de la cuisine-salle de bains et une fenêtre non isolée dans la petite chambre...
« Je faisais la cuisine avec mon manteau en hiver et on dormait avec des pulls et plusieurs couvertures. Pour atteindre l’évier, il fallait enjamber le bac à douche. Je me disais : je paye mon loyer et je vis comme ça ? »
Thamrat ne sait plus combien de lettres elle a envoyé à son bailleur et combien de fois elle a appelé les services de la Ville de Paris pour dénoncer ses conditions de logement. Malgré les constats, malgré les relances, rien n’a bougé pendant toutes ces années. Elle a renoncé aussi à compter le nombre de fois où elle a été inondée dans ce logement décati. « À un moment donné, le propriétaire m’a demandé 8 000 euros de revalorisation de charges en me menaçant d’expulsion. Là, je me suis dit, je n’en peux plus. J’ai arrêté de payer et je suis allée voir l’Espace Solidarité Habitat. Heureusement que j’ai eu ce déclic ! Je n’oublierai jamais l’accompagnement que j’ai eu. D’abord, on m’a vraiment écouté, puis on m’a expliqué mes droits, on m’a conseillée de prendre un avocat pour me défendre, ce que je n’aurais jamais fait toute seule et j’ai découvert que j’avais droit à l’aide juridictionnelle. Pour moi, un avocat, c’était forcément très cher…
L’ESH a fait des recherches pour savoir pourquoi mes demandes de logement n’avaient jamais abouti, si je n’avais pas été victime de discrimination. Mélanie, qui m’a accompagnée pendant plus d’un an, m’a dit qu’il fallait attaquer juridiquement l’État car j’étais prioritaire Dalo. Je lui ai fait confiance car depuis le début, elle se battait pour moi. Elle faisait toutes les démarches possibles, rappelait tant qu’elle n’avait pas de réponse et prenait de mes nouvelles régulièrement. C’était la première fois qu’on me soutenait ainsi. J’ai eu à la fois une écoute attentive, mais aussi une vraie implication pour me défendre jusqu’au bout. Je suis finalement passée au Tribunal de Grande Instance. J’avais peur qu’on ne m’écoute pas, mais là encore, l’ESH et l’avocat m’ont aidée à me préparer. Finalement, je n’ai pas été expulsée, et en plus, j’ai obtenu un logement. Toute cette période a vraiment été dure car je passais en même temps mon diplôme d’infirmière. J’ai tenu grâce à ma fille et à l’accompagnement de l’ESH.
Aujourd’hui, je suis diplômée et ma fille et moi vivons dans 60 m2, avec vue sur Paris. Mon loyer a presque diminué de moitié. Sans cet accompagnement, rien de tout cela n’aurait été possible. Sincèrement, je ne connaissais pas l’abbé Pierre mais j’ai compris sa vocation : défendre celui qui est démuni. »