La confidence de l’abbé Pierre à Laurent Desmard
Je me souviens très bien de notre échange, c’était en novembre 2006. D’abord parce qu’il s’agissait d’un des derniers, mais aussi parce qu’il a pris tout son sens pour moi dans les mois qui ont suivi.
En 1954, un couple vivait dans les bois, près de la communauté, à Neuilly Plaisance. Il avait un fils et la femme était enceinte. L’Abbé est allé les rencontrer et les a installés dans la maison. Peu après, la femme s’est retrouvée seule et l’abbé Pierre a toujours eu un œil sur elle et ses enfants, particulièrement la fille qu’il a toujours soutenue. Une fois mariée, elle a eu elle-même une fille, Marlène, qui est devenue avocate.
En décembre 2006, Marlène est venue voir l’abbé Pierre et lui a confié qu’elle allait quitter son mari. L’abbé Pierre a été très attristé : « Encore des enfants qui vont se retrouver seuls avec leur mère… » Je l’ai senti désemparé et lui ai proposé qu’il parte en vacances avec eux. Il avait en effet prévu de prendre une semaine à la montagne. Il a tout de suite été enchanté par cette proposition et je me suis chargé d’organiser leur voyage.
Quand tout a été prêt, nous étions en l’un en face de l’autre et il m’a dit avec ferveur :
« Laurent, te rends-tu compte de la chance qu'on a de pouvoir aider les autres ? »
Cette phrase m’a fait réfléchir : pour moi, en effet, jusque-là, aider était plutôt synonyme de devoir, d’obligation morale. Et peu à peu j’ai compris ce qu’il voulait dire : À quoi sert la force, si ce n’est à servir les autres ? C’est cela qui lui donne sens !
Quelques jours après, l’abbé Pierre nous quittait… Aujourd’hui, en tant que nouveau Président de la Fondation, je veux dire à tous ses donateurs, bénévoles et salariés que nous avons la chance de porter tous ensemble ce message d’espoir de l’abbé Pierre : aider ceux qui ont moins de force que nous.