Mal-logement à La Réunion : éclairage sur le « Logement d’abord »
La Fondation présente son éclairage régional sur l’état du mal-logement à La Réunion.
« La situation est alarmante aujourd’hui, à La Réunion, car la précarité est massive et structurelle, avec 36% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Depuis 3 ans nous assistons à une aggravation de ce phénomène.Nous ne devons pas tomber dans des logiques de renoncement, même lorsque l’on voit les institutions se « renvoyer la balle » en laissant à la rue et sans solution un jeune jeune de 15 ans !
L’hébergement d’urgence ne fait plus face à l’urgence de la mise à l’abri pour toute personne en situation de détresse psychique, médicale ou sociale comme le prévoit pourtant la loi. En 2023, le 115 a reçu près de 60 000 demandes d’hébergement d’urgence, dont 28% sont restées non pourvues. Il y a un enjeu fort pour maintenir des dispositifs de mise à l’abri, d’autant que le nombre de domiciliations administratives a doublé en 3 ans (4200 personnes domiciliées). Le nombre de personnes accueillies dans nos nos 3 Boutiques Solidarité a doublé par rapport à l’année dernière et il a continué d’augmenter, ce premier trimestre 2024. À la Boutique Solidarité de Saint-Denis, on a accueilli plus 600 personnes accueillies depuis le début de l’année, un triste record quand nous avions accueillis 1200 personnes sur toute l’année précédente.
Autre point d’alerte, le rythme et le dynamisme de la politique du « Logement d’abord » qui se sont nettement ralentis depuis deux ans Cet éclairage a pour but de s’appuyer sur les 10 ans (2012- à 2022) de déploiement positif du LDA (Maisons Relais, UN chez soi d’abord, Intermédiation locative, etc.) afin que La Réunion, de par notre insularité, puisse être un territoire « zéro personne à la rue » d’ici 5 ans. Cela passe par la mobilisation de tous les outils du Logement d’abord et les crédits disponibles, notamment pour construire des nouvelles Maisons Relais et les premières résidences sociales à La Réunion (et dans les Outre-Mer) … De plus, nous attendons encore de recevoir les appels à projet pour les Foyers de Jeunes Travailleurs qui ne sont toujours pas lancés.
Point de bascule
Depuis le 1er janvier dernier, la taxe sur les logements vacants (près de 35 000 logements vacants à La Réunion, soit 9% de l’ensemble du parc), que nous réclamions à la Fondation depuis plusieurs années, est enfin applicable à La Réunion… mais il reste désormais à ouvrir la possibilité aux collectivités ultra-marines de pratiquer l’encadrement des loyers. En effet, La Réunion fait partie des territoires avec des niveaux de loyers les plus élèvés de France (15€/m2 en moyenne), si bien que de nombreux locataires ne trouvent plus rien à louer à des prix abordables avec pour certains 80 % de leur budget consacré au logement.
Dans le même temps, le logement social est saturé (seulement 5000 attributions, soit une baisse de 20,6 % en un an), la liste des demandeurs s’allonge (44 796, +35 % depuis la crise sanitaire) et les livraisons sont insuffisantes pour répondre aux besoins (1700). L’enjeu est de produire du logement très social (LLTS) puisque 88 % des demandeurs y sont éligibles.
En résumé, nous avons besoin de retrouver un pilotage beaucoup plus fort de la part de l’État, entrainant dans son sillage le Conseil Départemental afin que plus personne ne soit laissé sur le bord de la route, sans logement ni hébergement, à La Réunion. »
Matthieu Hoarau, directeur de la Fondation à La Réunion/Océan Indien.
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