Neuilly-Plaisance, la première communauté Emmaüs
30/07/2013
Nous sommes en 1949, à Pâques, et l'abbé Pierre a recueilli depuis quelques mois déjà Georges Legay, cet homme désespéré qui voulait se suicider.
Avec son indemnité parlementaire, l'Abbé réhabilite une vieille maison à Neuilly-Plaisance, dans la banlieue Est de Paris. Les déshérités, les sans-abri, les familles ne cessent de frapper à la porte de la maison.
L'Abbé et sa secrétaire, Lucie Coutaz, accueillent sans relâche.
La maison devient vite un lieu de rencontres où l'on séjourne le temps nécessaire, selon ses besoins. La "mère Coutaz" est là, avec sa machine à écrire et le "petit gars avec sa soutane", comme on appelle l'Abbé à cette époque, gère les arrivées quotidiennes :
"T'étais caporal-chef dans la légion ? Tu sais commander ? Parfait, j'ai besoin de toi."
C'est ainsi que Norbert, inconnu 10 minutes auparavant, fut embauché comme chef d'équipe sur le chantier de la 1re cité d'urgence. "L'abbé Pierre était comme ça, il avait besoin de quelqu'un, il faisait confiance tout de suite. Et tous les soirs, devant la maison, chacun recevait son sou, en paiement de sa journée de travail", se rappelle Jean-Pierre, l'un des plus anciens compagnons de Neuilly-Plaisance.
Ils sont parfois plus de 50 accueillis sur place et certains dorment dans une baraque en bois attenante à la maison. La première communauté de Compagnons Bâtisseurs vient de naître.
"J'ai pris une planche, écris Emmaüs dessus : ici on entre dans l'enthousiasme."
Redonner courage et enthousiasme à ceux que les épreuves de la vie ont brisé ; aider les autres et s'aider soi-même.
En 1951, l'abbé Pierre quitte le Parlement et les fonds manquent rapidement. Un compagnon de la 1ère heure, Auguste Legall, a l'idée de "faire les poubelles" car il est hors de question de mendier. Rapidement, les "biffins" ou chiffonniers s'orientent vers le débarras de logements pour récupérer et vendre matières premières et objets d'occasion. Après le magasin de Neuilly-Plaisance, celui de Bougival verra le jour quelques semaines plus tard.
Peu à peu, les communautés de Chiffonniers Bâtisseurs d'Emmaüs vont se développer sur un principe unique : "Donne-moi ton aide pour aider les autres".